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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

10 Dec

Un Livre Que J'ai Lu (194) : Du Néant à Dieu (Ernest Hello)

Publié par Alighieridante.over-blog.com

 

 L'amour-propre, nous dit Ernest Hello, est l'amour de la limite adorée pour elle-même (p14). Cette limite est le fini de l'être, et cette finitude est l'affirmation de la limite de la créature. Le mot fini est l'inverse du mot infini, lequel nie le premier pour se définir. Et cette limite quand elle se rapporte à elle-même sans se rapporter à Dieu qui est illimitable, s'attribue à elle-même ses limites afin d'être indépendante et autonome pour se diviniser. La limite en elle-même est néant mais si elle se place en Dieu elle devient réalité parce que Dieu qui est infini ôte les limites aux corps finis. Ainsi, en dehors de Dieu, les corps limités deviennent néant parce qu'ils ne reçoivent plus la lumière divine qui les définis. Ils sont plongés dans les ténèbres pour devenir ombre. C'est pourquoi, en dehors de Dieu, les corps finis ne sont rien. La croix, objet de supplice et de mort, fut illuminé par Dieu quand le Verbe s'y posa. Cet objet sombre devint lumineux parce qu'il fut glorifié en Dieu (p15)

 

 Le silence a été donné par Dieu aux hommes et le bruit est un culte donné à Satan. Le silence c'est la parole qui fait défaut pour parler à Dieu parce que les mots, limités en eux-mêmes, ne peuvent définir ce que seul Dieu peut définir.  Ainsi, quand l'homme parle à Dieu sans dire mots, il lui dit tout (p16). L'homme pieux hésite véritablement à parler à Dieu avec la parole des mots car il a peur de circonscrire et d'anéantir son amour. La charité est donc la forme la plus concrète et la plus immense de la parole donnée à Dieu. Elle est le messager du coeur et de l'esprit, elle parle véritablement à Dieu. La charité est la joie du coeur et de l'esprit. Et le silence est la voix de Dieu qui parle en l'être et qui plus haute que lui, le dirige vers son Amour. 

 

Son amour c'est donc la paix assurée mais cette paix n'est pas une paix au sens de l'objet fini mais au sens de l'infini, c'est à dire que la paix de Dieu est conditionnée à la confiance qui lui ait accordé et cette confiance se traduit dans l'abandon total à sa volonté. En effet, celui qui séjourne dans l'absolu confiance en Dieu sait que quoi qui lui arrive, Dieu ne l'abandonnera jamais. Son amour est si grand, et le mot est faible, que Dieu agglomère à sa nature et donc à sa paix les êtres libres qui désirent l'aimer. L'abandon complet à Dieu, c'est à dire l'anéantissement radical de l'être engendre donc la miséricorde radicale de Dieu (p27). Ainsi, nous dit Ernest Hello, "quand l'homme ne voit plus que son néant, Dieu ne le voit plus que dans sa miséricorde."

 

 L'homme doit donc rejoindre son néant et accepter l'idée qu'il n'est rien sans le regard de l'infini posé sur lui. Car Dieu redéfini l'être en lui accordant la proportion de l'infini. Sous le regard de notre propre finitude nous sommes comme ces personnages de Pablo Picasso, nous sommes déformés et laids (ici, à gauche). Sous le regard de l'infini, Dieu redonne harmonie à notre humanité, à l'image de ces personnages peints par Léonard de Vinci (ici, à droite). L'époque athée et moderne a honoré Pablo Picasso et en a fait le héros irréprochable de l'art. L'homme moderne ne voit donc pas son néant, il se glorifie dans la laideur pour se complaire dans sa finitude. Il a perdu le Christ qui est l'image vivante de Dieu, c'est à dire l'image de l'infini. S'explique alors, lors de la sainte Passion, cet acharnement du fini à défigurer l'infini. Le fini, tels les personnages de Francis Bacon (ici),  tend vers la disgrâce et la difformité. Et à la faveur de ces laideurs, l'homme moderne s'admire dans sa propre déconstruction. C'est le fini privé de l'infini qui idéalise un idéal sans perfection (p29)

 

 L'orgueil, nous dit Ernest Hello, affirme l'infini de l'homme et le néant de Dieu tandis que l'humilité affirme le néant de l'homme et l'infini de Dieu (p35). L'homme athée tire de l'obscurité son orgueil, réalisant une fausse supériorité qui engendre le refus de la supériorité absolu. Cet orgueil se définie dans une position intellectuelle qui lie la croyance en Dieu à la superstition et à l'ignorance. Ayant déterminé arbitrairement les motifs de la croyance en Dieu avec un apriori qui provient du kantisme, l'homme athée produit un jugement érroné. La foi et la raison sont étroitement liées et nous ne disserterons pas ici sur le sujet tant celui-ci est dense. L'homme athée pour sortir de son athéisme doit éprouver son néant. La maladie et la pauvreté sont des phases d'apprentissage du néant. Et ce néant Dieu l'a éprouvé à travers le Christ qui a accepté le dépouillement absolu (p40). Ce grand dépouillement a réconcilié l'infini et le néant. Cet acte de réconciliation est la démarche de Dieu vers sa créature empétrée dans le néant. Celle-ci est incapable par elle-même de sortir de son néant et la Révélation est la main tendu par Dieu aux hommes. Cette main qui surgit dans les ténèbres veut extirper les hommes de leur obscurité. Et le Christ qui est l'image de Dieu, s'est présenté à l'homme pour que l'homme puisse voir Dieu. Cette rencontre a historiquement lié l'humanité à Dieu.

 

 Si Dieu eût dû faire, nous dit Ernest Hello, des êtres dont la volonté dépendît absolument de la sienne, il eût préféré ne rien faire. Ajoutant, Il a créé pour voir hors de Lui la liberté (p47). Dieu aime tellement l'homme qu'il ne peut accepter l'idée qu'il soit sa marionnette. Il accepte donc que l'homme le défie et le rejette. C'est donc à travers le péché et le blasphème que l'homme combat son Créateur car le péché lutte contre Dieu et le blasphème attaque Dieu dans son essence. La figure, par excellence du péché est Satan, le premier ange rebel qui, dans l'Eden, tenta l'homme. Dans les "Fleurs du mal" Charles Baudelaire qualifie Satan de savant chimiste qui vaporise le riche métal de notre volonté et pour Ernest Hello, l'esprit de l'homme est le laboratoire de Satan.

 

 Cette rébellion on la retrouve dans Jacob affrontant l'ange du Seigneur (ici). L'ange, voyant qu'il ne pouvait vaincre Jacob, le blessa à la hanche. Mais Jacob, désirant que l'ange le bénisse, ne céda pas. L'ange finit par le bénir et lui donna le nom d'Israël (Livre de la Genèse 32,28). Cette lutte, on la retrouve dans cette mère qui pour sauver son enfant malade qu'elle porte dans les bras, se dirige dans les rues de Rome vers une statue de la Vierge tenant l'enfant Jésus. L'ayant trouvé, elle accable la Vierge de reproches. Cette pauvre mère qui rencontre la Mère de Dieu n'hésite pas, elle demande à la Vierge de se mettre à sa place et de considérer son enfant malade. L'enfant fut alors guéri (p49). Dieu cède devant sa créature farouchement déterminée, comme l'ange devant Jacob. Cette détermination est une manière de faire un pas vers Dieu, nous dit Ernest Hello (p67). Mais l'amour propre de l'homme athée obscurcit la vérité et la voile sous le fait d'un raisonnement déréglé qui singe le bon sens (p57). L'orgueil de l'homme athée étouffe, dans la limite qui est le pays de l'homme, le besoin de Dieu. C'est le pays de l'obscurité, du froid et de la solitude et ce pays devient alors la demeure du monde.

 

 Et ce monde est le terrain de jeu du péché où l'homme, bien trop souvent confond l'amour du pécheur avec l'amour du péché (p80). Avoir une sainte horreur du péché c'est avoir une sainte horreur du mal. Il est en est de même de l'erreur et de l'injustice et l'homme qui ne déteste pas profondément ces deux tendances, n'aime pas véritablement la vérité et la justice. En effet, il existe des hommes qui n'aimant pas la vérité et la justice, sont d'habiles défenseurs de la vérité et de la justice (p37, p79). Vis à vis du péché, nous dit Ernest Hello, le monde est indulgent, il s'accoquine aisément avec lui. C'est pour cela que le monde a de la haine envers les saints parce qu'ils tiennent en horreur le péché. Et cette haine envers le péché, nous dit Ernest Hello, est inintelligible pour le monde car elle est d'institution divine. Et ce fut aux douces mains de la très Sainte Vierge Marie que fut confiée la haine sublime du serpent. Entre la femme et le serpent, Dieu a placé lui-même cette haine et cette haine est faite de main de Dieu (p81). Cette haine a effrayé les saints parce que certains ayant vu, par la grâce de Dieu, la puissance du péché, ont défailli. A l'inverse, beaucoup d'hommes, bien installés dans le confort de leur péché, ont en horreur la vertu et n'ont plus la haine du mal, c'est pourquoi, les ténèbres qui nous entourent sont si épaisses. 

 

 Plus le mal trouve sa place parmi les hommes, plus il redéfini l'amour. Dans l'esprit de Satan, la conception de l'amour est lié à la jalousie, c'est l'amour jaloux, c'est le chef d'oeuvre de la haine, nous dit Ernest Hello (p95). Satan du temps où il était Lucifer, était jaloux de Dieu et cette jalousie a fait naître en lui un orgueil démesuré. Et Dieu voyant son plus bel archange dégénérer à cause de cette jalousie, lui offrit un domaine dans lequel il pouvait faire régner la jalousie et les passions infernales. Cet amour inférieur se ferme sur lui-même, il s'idolâtre et tend au sacrifice de l'autre pour que l'autre ne produise plus la souffrance qu'engendre la jalousie. Celui qui aime véritablement, meurt pour les autres et celui qui aime pour s'idolâtrer donne la mort (p96). Quand l'homme obéit à l'amour de Dieu, il entre dans l'unité divine, c'est la communion des saints et Dieu est le centre de cette unité. C'est lui qui maintient l'Amour avec un grand "A" entre les créatures. Cette loi forme l'unité essentielle (p101). Dieu est le seul propriétaire de l'unité et tout ce qui veut faire l'unité en dehors de Dieu ne demeure qu'à l'état de tentative pour n'aboutir qu'à une parodie sacrilège. S'unir dans une autre essence que celle du Père, du Fils et du Saint-Esprit, c'est s'unir de manière obscure sur des principes de la plus basse réalité, c'est l'unité de l'amour-propre, de l'amour idolâtre, de l'amour satanique car Satan, nous dit Ernest Hello, parodie tout. C'est pourquoi l'unité des hommes doit s'opérer selon la maxime du Christ qui dit, "Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé.", c'est l'affirmation de l'unité de Dieu (p103)

 

Antoine Carlier Montanari

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