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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

05 Dec

Un Livre Que J'ai Lu (136) : Le rêve d'un homme ridicule (Fédor Dostoïevski)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Un Livre Que J'ai Lu, #Fédor Dostoïevski

 

 Quelle étrange histoire que cette histoire d’un homme ridicule qui prétendait connaître la vérité, laquelle, selon ses dires, ne pouvait être entendu de ceux qui le traitaient de fou, mais ceux-là même qui le traitaient de fou ignoraient bien que cet homme savait plus que tous les autres qu’il était ridicule – et du fait de son seul orgueil il ne voulut le reconnaitre devant personne. Et puis un jour il eut inopinément l’intuition puis l’étrange idée que rien n’avait de sens, plus précisément ça lui était égal qu’il y ait quelque chose ou qu’il y ait rien. Prit d’un vertige nihiliste, plus rien n’avait d’importance, aussi bien l’injustice causée par les hommes que les hommes eux-mêmes au point de ne plus les remarquer. Cet état d’esprit le mena à l’idée du suicide, le revolver lui parut le moyen adéquat pour accomplir cette délicate tâche. Ce qui arriva par la suite fut invraisemblable pour ne pas dire saugrenu ou extravagant, quoi qu’il en soit si un terme doit être usité pour qualifier la suite de l’histoire il doit tenir compte des effets fantasmagoriques ou hallucinatoires que produit un esprit aussi ingénieux que celui de Dostoïevski.


 Ainsi, le revolver demeura muet et notre homme ridicule s’endormit aussitôt. De là, dans un rêve, il s’empressa de prendre le revolver pour se tuer. Se sentant aussi mort qu’un mort bien qu’il n’a jamais senti ce que c’est d’être mort mais quoiqu’il fut endormi il put imaginer que mourir c’est un peu dormir, il perçu alors qu’il était dans un cercueil fermé, du moins par le tangage que peut produire un cercueil lorsqu’il est mené sous terre. Et puis au bout de quelques jours il quitta l’obscurité de son cercueil pour celle de l’espace et fut conduit par une curieuse créature sombre vers un lieu inconnu où résidaient un soleil identique au nôtre et une terre en apparence similaire à la nôtre. Et comme par enchantement, comme cela se passe régulièrement dans les rêves, notre homme ridicule se retrouva sur cette terre en train de contempler les merveilles qui se présentaient à son regard ainsi que ses habitants dont les yeux étincelaient particulièrement et qui étaient certainement dû à ce même état de pureté qui recouvrait nos lointains ancêtres avant qu’ils n’aient gouté du fruit de l’arbre défendu. 
 

 Ces hommes et ces femmes étaient plein d’amour, plein de cette qualité d’être qui touche le sublime et qui de bonté, de gentillesse et de simplicité irradiaient d’eux-mêmes comme si se fut Dieu lui-même qui séjournait en eux. Notre homme ridicule eut vite fait, comme le serpent en son temps, de corrompre toute cette nature et bien qu’il n’ait pu faire autrement du fait de son imperfection, il fut la cause du péché originel. Il s’en suivit tout un tas de dérèglements, identiques en tous points à ceux que connaissent les humains. De là, notre homme ridicule, pour faire taire sa conscience, se dénonça et implora de le crucifier pour absoudre sa faute. Persévérant dans cette voie-là, ils le menacèrent de l’enfermer pour le faire taire. C’est alors que son cœur se serra avec force comme si la mort fut à l’œuvre, mais aussitôt notre homme ridicule sorti de son rêve.
 

 C’est par l’intermédiaire de ce rêve que Dostoïevski va faire prendre conscience à notre homme ridicule de la vérité. Selon Dostoïevski le mal serait depuis le péché originel l’état normal des hommes, et bien que cela constitue la vérité pour notre homme ridicule depuis qu’il a vécu en rêve l’effrayante transition, le commandement de l’homme de Nazareth demandant  de s’aimer les uns les autres, devint une évidence, de manière axiomatique et comme la solution à tous les problèmes. A travers cette nouvelle, Dostoïevski révèle donc la vérité, non pas sa vérité mais la vérité nue comme si elle se trouvait sur la croix et que les hommes ont lynchée comme si elle fut un ennemi à abattre. 

 Bien que fantastique, cette courte histoire en dit long sur les convictions profondes de Dostoïevski. Là où beaucoup d’auteurs et je pense en particulier à H.P Lovecraft (ici), parce qu’il fut un précurseur majeur de la littérature fantastique, et qui maniait ce genre avec maestria, n’en profita pas pour autant  pour y signifier la vérité. Ces auteurs s’engouffraient dans d’épaisses ténèbres sans que jamais le lecteur n’ait à faire à une révélation cathartique qui serait en mesure de lui ouvrir les yeux là où il n’était pas disposé à l’entendre autrement. On peut bien entendu citer C.S Lewis et J.R.R Tolkien dont les œuvres ont allégorisé l’esprit des évangiles mais le chemin qui mène à cette compréhension est de l’ordre de l’interprétation. A travers son homme ridicule, Dostoïevski s’est peut-être dépeint lui-même, comme si il s’était rendu coupable d’une quelconque désorientation spirituelle envers autrui.  En devenant cet homme ridicule qui avait fini par aimer tout le genre humain parce qu’il avait fait sienne les paroles du Christ à propos de l’amour, Dostoïevski se reconnait pécheur et en tant que tel la religion de ce même Christ lui est alors apparait comme la seule capable de sauver l'humanité de sa propre folie.

 La chose est assumée, les convictions de cet homme ridicule, n'en déplaise à certains lecteurs, sont ici mises en lumière à travers un narratif fantasmagorique où la créature sombre qui le mène dans ce paradis terrestre et qui, selon ses propres mots, et qui bien que possédant comme un visage humain, sentait à son encontre une répulsion profonde 

n'est peut-être autre que le diable lui-même.  

lecteur devra réaliser que l'auteur


Antoine Carlier Montanari

 

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