Le Medovic : Le Café Pouchkine

 Au jardin du délice flânoche une indiscrète odeur de miel et de banane dont il semble qu'un esprit bien insouciant y a élu domicile. A vrai dire, au centre même de ce jardin, une petite table blanche a posé ses pieds tout en attendant l'heure du goûter. Certainement que, lorsque le carillon de l'horloge murale de la grande demeure aristocratique située plus à l'est, tintinnabulera comme il lui ait demandé chaque après-midi avant que le soleil ne donne ses premiers signes de fatigue, cette petite table ouvragé comme un napperon magnifiquement brodé aura vu d'invisibles amis tout droits sortis de la forêt bordé par la petite rivière qu'un pont de pierre aura joliment enjambé, venir lui tenir compagnie. Il est vrai qu'ici la terre dort enseveli sous une mousse absolument sublime semblable à ce désert de neige affreusement doux qu'enfante l'hiver. Et cependant, ce tapis qui montre sa toison somptueuse exhale une maigre et non moins féconde oraison orgiaque où flânent quelques miettes d'or pleines d'étincelles. Je suis alors la cuillère enfonçant son corps dans ce ventre prodigieusement moelleux où je découvre une gémissante mais silencieuse poudre musquée. Ce lieu couronné de douceur est un trésor d'oisivetés aromatiques qui à travers la lande étend son ocre corps comme une proie à la gourmandise. Aussi, de mémoire de tsar, pareil enchantement ne sommeille jamais très longtemps quand l'hiver consolide ses premières forces. Il va sans dire, que le cœur tendre, au coin d'un feu, rendra grâce à l'éternité qu'un tel raffinement ne contraint pas au péché.

Antoine Carlier Montanari