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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

11 Feb

Un Livre Que J'ai Lu (41) : La Nièce De Flaubert (Willa Cather)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Un Livre Que J'ai Lu

 Ce petit livre est bien admirable, l'auteur, l'écrivain américain Willa Cather, nous conte sa rencontre, lors d'un séjour à Aix-les-Bains, avec la nièce de Flaubert . Cette dame âgée qui se  nomme Caroline passe le plus clair de son temps à l'opéra et à peindre en plein air sous un soleil caniculaire. Cet été là, en effet, est particulièrement chaud, très chaud, et sous cette fournaise les deux femmes vont se lier d'amitié. Les discussions qui vont s'en suivre vont nous apprendre que Flaubert, de toutes ses œuvres, La tentation de Saint-Antoine est sa préférée (p37). Et tandis qu'elles soutiennent cette chaleur, elles évoquent Hérodias (p43) et la décapitation de Jean le Baptiste. Echo plus ou moins lointain de Madame Bovary, Hérodias est cette femme putride de cœur que le prophète Jean a démasqué. La tête coupée du saint annonce le visage mortifié du Christ sur le voile de Véronique. A l'inverse, Persée décapitera la Gorgone Méduse dont le regard pétrifiera le monstre marin chargé de dévorer sa bien-aimée Andromède. L'évocation de l'autre roman de Flaubert, Salammbô, quelques lignes plus haut, intervient comme une réponse féminine à l'hégémonie masculine. En effet, Salammbô tendra une coupe à son bien-aimé comme le symbole de son amour. C'est la main invisible d'Hérodias qui sous le plateau porte la tête du saint. Salommbô, la femme au serpent, surgit alors comme un miroir de Ève qui tend à Adam la pomme qu'elle vient de croquer. La déesse Tanit, alors déesse de la fertilité et des naissances, dont Salammbô était la servante, a ce paradoxe qui aujourd'hui est renouvelé par la féminisme. En effet, les sacrifices d'enfants faisaient parti de son culte, comme quoi l'avortement, aujourd'hui, farouchement revendiqué par les femmes au cœur de la république, est tout autant ce même acte odieux que l'on offrait également à cette autre déesse et sœur du dieu Baal, Anat que pourrait d'ailleurs incarner Marianne où son buste lacté pontifie royalement dans toutes les mairies. Quoi qu'il en soit, la nièce de Flaubert, nommera sa villa d'Antibes, Tanit, du nom de la déesse (p42). Il nous est peut-être permis ici de penser que Willa Cather, bien que forte instruite, n'eut pas évoqué cet épisode de la villa sans penser un instant à sa propre condition féminine dont l'homosexualité jamais revendiqué, n'eut jamais été nié tant elle été connue pour ses amours féminines.

 Si Balzac est l'alpha et l'oméga de la littérature, nous dit l'auteur (p44), à travers lui c'est tout un pays qui est à l'honneur. La France a des maîtres qui ne peuvent être ignorés. Il en est ainsi de tout un tas d'autres artistes dont l'auteur évoquera pour asseoir sa culture. Il y aura Dickens et Scott, Ravel, Stendhal ou encore Brahms et Conrad. Caroline, la nièce de Flaubert, plus convenablement appelé Mme Franklin-Grout, évoquera son amitié avec l'écrivain russe Ivan Tourgueniev. Celui-ci, grand ami de Gustave Flaubert, venait, quand elle était plus jeune, relire sa traduction de Faust qu'elle avait entreprise pour son seul plaisir (p33). Il faudra dire que le chef d'oeuvre de Goethe inspirera Flaubert pour sa Tentation de saint Antoine. Outre la bonne éducation de cette dame, sa facilité pour les langues et notamment l'italien dont elle chérissait l'usage, elle avait une grande vénération pour la musique contemporaine de son époque. Si Igor Stravinski fut l'un des compositeurs qu'elle affectionnait pour ses compositions progressistes, ce dernier fut également l'amant de la grande couturière libérale française Coco Chanel. Si la boucle est bouclée, le féminisme en perspective, elle était une femme particulièrement admirable, qui aurait pu se trouver dans une nouvelle de Tchékhov comme l'expression française de l'idéal féminin indépendant.

Antoine Carlier Montanari

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