Artistes Gaga
Compte tenu de l'influence record qu'a connu l'exposition Basquiat ainsi que celle de Soulage l'année dernière, il pourrait apparaître aux yeux des curieux l'étrange phénomène qui accompagne ces évènements. Passé l'interrogation je me suis rendu compte de l'absence évidente d'une aptitude distinguée, que l'on pourrait appeler talent ou don, qui particularise ces deux artistes. L'on conviendra qu'ici la recherche de l'esthétisme ou de la beauté n'est pas de mise, l'essence de leur travail se concrétise dans une relative explication proposée pour justifier quelques gribouillages sur une toile. Certains diront à ces mots l'ignorance qui habite mon esprit et avec toute la courtoisie que je leur doit je leur répondrai que l'on peut donner de l'importance à ce qui en a pas. L'homme peut s'attarder des années entières sur un épi-phénomène et en distinguer la plus complexe explication par le simple fait de son cerveau. Il en va de même pour nos deux compères, rien à montrer tout à dire, je le résume ainsi pour faciliter l'explication qui s'en suit. En effet à bien y regarder lorsque l'homme s'ouvre au talent de ses congénères il se voit impliqué dans un processus de contemplation et de joie. La beauté ou la splendeur qui distingue par exemple le David de Michel-Ange provoque un émerveillement évident qui souligne la capacité humaine à bâtir le magnifique. Sans mesure demandée, l'ignorant comme l'érudit s'en trouve inspiré. C'est pourquoi au regard d'oeuvres majeures, qui sans restrictions ont été fabriquées dans le respect des codes moraux et esthétiques s'en voit décuplé par leur évidente concordance naturelle. L'esprit découvre dans la construction de l'artiste ce qui lui manque et se glorifie de l'apport spirituel et intellectuel qu'il vient de recevoir. Un échange précieux qui permet l'édification de la nature humaine tout au long de son cheminement. La grace et la beauté s'entremêlent et parachèvent l'oeuvre d'art dans sa dimension universelle. Sa fonction retentit de manière à répondre aux interrogations de l'homme et qui lui permet de se repérer aux mouvements de l'histoire. Dans ce contexte il apparaîtra aux yeux de la multitude que s'il devait rester une oeuvre à garder, la Joconde de Léonard De Vinci ou la Chapelle Sixtine de Michel-Ange gagnerait sans nul doute la préférence. La valeur intrinsèque de l'oeuvre est manifeste, qu'un Basquiat ou qu'un tube de Lady Gaga serait un choix futile en comparaison des requiems de Mozart par exemple. Dans l'inconscient collectif la mesure de la grandeur se traduit par ce qui est supérieur, de loin plus important que le reste de la production. Une évidence sans calcul qui ne se comprend qu'au détour de la complexité et du talent, apanages des merveilles où l'effort est consentit dans la souffrance. Il en revient à dire que dépeindre à la manière de Basquiat ou de Soulage ne demande qu'un faible courage et peu de talent. Tous ont la compréhension suffisante pour comprendre que de telles oeuvres peuvent être faites sans difficultés majeures et concèderont qu'ils pourraient en faire autant. Au détour des critiques, on remarquera que la considération qui établit Basquiat de génie, favorise inévitablement dans le regard du spectateur la mise au pinacle de la médiocrité. Pour faire simple si ce qu'il fait est grandiose, alors comme je peux le faire, je suis grandiose aussi. Flatter l'orgueil de cette manière permet de s'approprier les foules et de remettre en cause leur propre jugement et c'est ce qui fera dire à certains qu'un urinoir est
une oeuvre d'art. Antoine Carlier Montanari