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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

07 Jan

Un Livre Que J'ai Lu (182) : La Mentalité De Marché Est Obsolète! (Karl Polanyi)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Karl Polanyi, #Un Livre Que J'ai Lu

 

 Pour qui a lu la société du spectacle de Guy Debord et les manuscrits de 1844 de Karl Marx, ce petit essai d'un certain Karl Polanyi, économiste autrichien (ici), né en 1886 à Vienne, ne sera pas vraiment une surprise. Cette autopsie sommaire de l'esprit du marché révèle cette puissance d’homogénéisation du monde qui, je le rappelle, a été initié au temps de Babel. L'ère de la machine a réorganisé la vie humaine en automatisant l'homme. Cette restructuration du réel fonctionnel a relayé la pure notion du vrai à de la spéculation tout en dogmatisant la notion de l'utile. Nouveau suprématisme, la mécanisation a prit le pas sur l'organisation biologique, la normalisant pour effacer toute spontanéité. Au point, nous dit l'auteur, qu'il n'est plus possible de se tourner vers les idéaux d'un autre siècle, sans apparaître ennemi de l'humanité. 

 

 L'industrie a donc transformé l'économie traditionnelle en un mode de production standardisé où la mécanique a triomphé sur l'organisme et l'organisation, sur la spontanéité. Les énergies individuelles  se sont soumises volontairement à ce nouveau processus de rationalisation du monde, tout en abandonnant leur liberté intérieure pour se paralyser d'elles-mêmes dans ce que l'on nomme, la civilisation industrielle. Cet empire matérialiste a artificiellement environné le monde pour institutionnaliser le marché et ses lois. La mentalité du marché dont parle Karl Polanyi, entraine l'homme à fonctionner comme un automate programmé. Elle le domestique à travers la fiction de la marchandise que son industrie produit comme autant de miroirs flatteurs. Stratégie globale d'implosion spirituelle, la mentalité du marché a ainsi réinventé l'esclavage qui offre presque les mêmes possibilités d'accroitre les profits que l'esclavage historique.

 

 Léon Tolstoï, dans son ouvrage sur l'esclavage moderne (ici), avoue que la science absout l'esprit mafieux qui se cache derrière la hausse du taux de profit. L'industrie a éloigné l'homme du travail de la terre et de la vie paisible des campagnes pour l'associer à la machine. En concentrant toute cette masse d'énergie humaine, nous dit Léon Tolstoï, au profit de seulement quelques uns, cette nouvelle organisation, a rénové l'esclavage sous une forme moins visible. La soumission de l'homme par l'homme a donc prit au mensonge son art de la persuasion et le marché, vaste domaine de la spéculation financière, est devenu le lieu de l'avènement du totalitarisme mercantile où l'homme joue le rôle de source énergétique. Cette autoregénération du marché transforme les hommes en autant de générateurs d'énergie fossile que le marché du travail branche à différents secteurs d'activités afin que la production de la marchandise transforme la matière en compte bancaire. Ainsi, dans cette vaste organisation planétaire, les paysans devenus ouvriers, ont perdu l'autonomie alimentaire que leur procurait la terre. Désormais ils sont liés à la peur de mourir de faim et cette peur les fixe davantage au marché. Cette conversion forcée, nous dit Karl Polanyi, a dévitalisé la conscience de l'homme occidental en le dépossédant progressivement de son héritage civilisationnel.

 

 Aristote avait raison, l'homme n'est pas un être économique mais un être social. L'homme a besoin de d'exister socialement mais son immersion dans le système économique a corrompu cet état. En effet, le développement tout azimut du marché a engendré une organisation de la vie entièrement nouvelle où le gain est devenu l'objectif privilégié de l'effort. Guy Debord parle de glaciation visible de la vie et Karl Marx d'eaux glacées du calcul égoïste. L'auteur, Karl Polanyi questionne les sociétés primitives qui selon certains chercheurs, étaient naturellement organisées de telle sorte qu'aucun individu ne fut menacé de famine. D'une certaine manière, ces sociétés primitives apparaissent plus humaines que nos sociétés modernes. L'auteur, étant d'obédiance politique socialiste et dans la veine de notre cher Rousseau, semble être séduit par cette idée fantasmé du bon primitif. Le voyage dans ce coeur des ténèbres conté par Joseph Conrad (ici) douchera tout espoir dans ce sens-là. Certes ces sociétés primitives n'étaient pas happés par le gain et le profit, mais elles n'ont jamais rien développé par le travail organisé qui puisse les faire sortir de l'état d'être rudimentaire. L'auteur n'ignore pas qu'une société complexe a besoin d'un pouvoir organisé, qui nécessairement doit établir certaines règles et les faire respecter pour ne pas laisser s'installer l'anarchie. La survie de la société est primordiale et la volonté de l'individu doit parfois être maintenu à son stade embryonnaire.

 

 C'est vrai, l'homo economicus est inssatiable dans son désir d'ammasser de l'argent. C'est un trait de caractère qui le pousse dans les bras de la corruption. La motivation, nous dit Karl Polanyi, représente véritablement l'homme moderne, et plus particulièrement celle qui vise le gain par les affaires. Cette motivation s'affermi dangereusement dans cette vaste arène du marché mondialisé, et enracine puis développe, au coeur de l'être, la cupidité, sans limite aucune. Les riches d'aujourd'hui sont insolemment plus riches que les rois d'hier, l'argent facile a gonflé exagérément leurs comptes bancaires. Le marché mondialisé a donc définit un nouveau genre d'existence où toutes les catégories sociales travaillent de concert pour satisfaire l'économie de marché et rien d'autre. Cette mise en forme de la société toute entière est harmonisé par les seules exigences du marché. 

 

 L'auteur, Karl Polanyi, plaide donc pour la diversité retrouvée des motivations, condition nécessaire à la désintoxication mentale produite par le déterminisme économique du marché. Le défi vital d'aujourd'hui, dit-il, consiste à rendre à l'individu la plénitude de sa vie, même si cela peut signifier une société techniquement moins efficace. Le marché et son corollaire, l'économie libérale, ont permi bien des libertés, la liberté d'entreprendre, la liberté de prospérer, la liberté de conscience, la liberté de parole, la liberté de réunion et d'association, la liberté de choisir son métier et la liberté de voyager, mais ces libertés sont aliénées par le caractère dominateur, voire despotique du marché. En effet, ces libertés sont agglomérées au mouvement centrifuge des forces matérialistes qui parasitent les motivations spirituelles de l'homme. En réalité, ces libertés bougent les hommes comme des marionnettes tout en installant au coeur de leur être un faux sentiment de liberté. Ce faux sentiment est une compensation pour amoindrir la perte du désir de la vérité. La vie sociale est donc organisée et même managée pour satisfaire les sens. Les hommes ont donc accepté la philosophie du laisser-faire. Il font confiance, presque aveuglément à de petits groupes d'hommes que l'on appelle élite et qui sont considérés comme plus sages pour maintenir l'économie de marché. Et ces petits groupes d'hommes travaillent uniquement à faire de l'économie de marché, le système de gestion définitif de l'humanité.

 

Stendhal, en 1825, dans un pamphlet particulièrement juteux (ici), s'élèvait déjà contre la puissance grandissante de l'industrie que Karl Marx explicitera, quelques années plus tard, dans ses manuscrits de 1844 (ici). En abordant la question de la fabrication de l'opinion, Stendhal dame le pion au fameux Edward Bernays qu'on dit initiateur de la fabrique du consentement. L'industrie, dit Stendhal, veut envahir toute l'estime et pour cela elle fabrique l'opinion pour le peuple à travers des journaux qu'elle paie bien. Les conséquences de cette vaste entreprise de contrôle mental, sont dévastatrices pour l'humanité. En effet, la conscience authentique de soi-même est étouffé par la notion de l'utile. Laquelle juge de la valeur de toutes choses pour le plus grand avantage du marché. On peut être alors d'accord avec Karl Polanyi quand il qualifie de monstruosité sociale ce modèle de vie engendré par cette fameuse mentalité de marché. 

Antoine Carlier Montanari

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