Un Livre Que J'ai Lu (123) : Traité Des Excitants Modernes (Honoré de Balzac)
On ne se rend pas forcément compte des dérèglements que peuvent causer certaines substances naturelles au sein d’une société moderne composée essentiellement d’individus névrosés et aliénés. Ces substances qui permettent d’échapper momentanément au tournis imposé par le rythme économique, deviennent tout simplement, en reprenant les mots de Baudelaire, des paradis artificiels. Honoré de Balzac va donc relever pour nous un certain nombre de ces substances qui bien qu’agréables au palais et utiles pour amoindrir les effets néfastes de la condition humaine, participent en proportion de leur usage à l’aliénation de l’individu et par extension à celle de la société. C’est peu dire que de constater l’usage intensif du tabac et de l’alcool, mais il faut dire que c'est le temps disponible qui permet leur consommation, l’oisiveté pousse donc dans le sens de l’excès. Ainsi, cet état de paix, comme le nomme Balzac, serait donc propice à la consommation abusive de ces substances, il apparaît alors que cet état soit préjudiciable pour le corps et pour l'âme si bien que l'état contraire, à savoir celui de la guerre, peut alors devenir salutaire. Napoléon qui disait « La guerre est un état naturel. » (p9), avait certainement compris que la véritable paix ne pouvait réellement s'établir ici bas. Si en effet l’état de paix indispose un certain nombre d’individus qui bien incapables d’occuper cet espace de temps afin d’accomplir des actions bénéfiques, préfèrent s’engager dans la voie des excès, il faudra alors rappeler, comme tout bon médecin, que cet état d’être est dangereux à la fois pour le corps, à cause de toutes les dérégulations biologiques qu’entraînent ces substances, et d’autre part pour l’âme à cause de l’état de péché dans lequel elle est tombée. Si cet état qui fut largement commentés par les théologiens devient funeste, il faut alors rappeler que sans les organes qui réclament de nous de telles substances, et qui forment un arsenal de besoins à satisfaire (p8), nous aurions du mal à donner du piquant à l’existence.
Si donc, comme nous l’expose Balzac, l’eau-de-vie, l’alcool, le sucre, le thé, le café et le tabac sont ces substances qui modifient les sociétés modernes (p7), elles les modifient de manière subtile et inaperçue. Une expérience relaté par Balzac et mené par le gouvernement anglais sur trois condamnés à mort (p12), montra que le condamné à mort qui au lieu d’être exécuté par pendaison, choisi de se nourrir exclusivement de chocolat, est mort après huit mois. Celui qui a choisi de se nourrir que de café a duré deux ans et celui qui a choisi de boire du thé a succombé au bout de trois années (p13). L’homme condamné au chocolat est mort dans un effroyable état de pourriture, nous dit Balzac, dévoré par les vers et ses membres sont tombés un à un. L’homme qui a bu uniquement du café est mort brûlé comme dévoré par un feu intérieur dont on peut deviner qu’il ne dévora pas que la chair. Quant à celui qui a bu exclusivement du thé, le pauvre bien qu’ayant vécu plus longtemps que ses camarades, n’eut préservé que les os et la peau. Bien que ces substances soient empoisonnantes quand elles sont prises à l’excès, il existe des individus qui fort bien privilégiés par la nature s’accommodent de tous ces excès et meurent d’une très belle mort à un âge très enviable. Ceux-là n'auront peut-être pas compris que l'état de bonne santé nous empêche bien souvent de réaliser notre extrême fragilité alors que nous sommes beaucoup plus infirme que nous serions le comprendre et c'est seulement l'état de maladie comme l'est l'état de guerre évoqué plus haut qui nous rend humble et par extension prudent et sage.
Si maintenant nous nous attardons quelque peu sur les propos de Balzac concernant le café, et sans trop dévoiler de ce qu’il dit, qui pour ma part est très instructif étant donné que ce breuvage m’est assez agréable, il faut assurément s’appuyer sur un certain Brillat-Savarin qui, entre bien d'autres substances qui touchent au palais, offrit quelques conseils sur le café qui ne peuvent être pris à la légère. En effet, selon notre spécialiste, le café, bien que fouettant le sang jusqu’aux nerfs et fort doué pour exciter le cœur, est propice à précipiter la digestion (p22). Le tempérament las y trouvera là un ami sûr - lorsque faisant affaire - un supplément d’énergie lui sera nécessaire. Plus précisément, le café agit comme un adversaire à la fatigue, et après avoir traversé l’estomac, il enflamme les veines qui mènent au cerveau et anime comme il le faut les membres utiles à la besogne. Ce faisant le café concassé, cher aux peuples méditerranéens (p24), retient bien le tannin afin qu’il ne soit pas délétère pour l’estomac. Enfin le café moulu dégage à la fois l’arôme et le tannin qui de pair font sacrément plaisir au palais (p25). C’est le café pris à jeun qui stimule et agite l’estomac comme l’esprit, l’état de nervosité qui en découle est produit par l’accélération du rythme cardiaque, lequel, en règle générale, et au regard du degré d’apathie propre à l’individu, rassemble comme deux corps d’armée la vivacité nerveuse et l’impatience. C’est alors que beaucoup de responsables professionnels domptés au réveil par notre fameuse substance, exigeront d'autrui le même entrain à la besogne. La facilité avec laquelle ils ont mis en marche leur corps est bel et bien le fruit de cette substance excitante qui met le feu à la chaudière malgré nous. Et il apparaît alors, que les responsables en question déjà bien excités par le café, ont une tendance fâcheuse à s'en prendre à leurs subordonnés pour atténuer les effets néfastes de leurs décisions. Si le café est ici chasseur, chez d’autres natures, bien moins fougueuses, et que Balzac qualifie de faible, il accentue l'état de somnolence en agissant comme un somnifère. En réalité l’état de stagnation qui est le leur est suffisamment puissant pour neutraliser les molécules actives du café (p28). Il va de soi que le café n’accroît pas seulement l'empressement et la présence d'esprit mais orchestre collectivement l'état de nervosité et l'état de stress à l'échelle planétaire, via les réseaux sociaux. En effet l'hystérie, le délire, la frénésie, la colère, l'énervement et l'affolement ne procèdent pas seulement du café mais plutôt d'un transfert émotionnel provoqué par des agités du ciboulot accro à la caféine. Cette contagion fait se multiplier les dépassements de vitesse, les accidents domestiques, les emportements verbaux et par extension la rivalité mimétique, les prises de décision hâtives, les décalages horaires nocturnes, la prise d'antidépresseurs et enfin des burn-out et qui dans dans cet immense accélérateur de particules qui s'appelle la mondialisation, sont en train de provoquer une surchauffe planétaire digne de l'apocalypse. N'allons pas dire non plus que le café est l'auteur de tout cela mais il a sa part de responsabilité dans cette histoire-là, comme quoi il est parfois difficile de comprendre un problème sans tout mettre sur la table! Concernant Brillat-Savarin, nous aborderons prochainement la question du goût qu'il a développé magistralement et que l'éditeur folio a amorcé dans ce petit ouvrage (ici) et qui nous en dira long sur un univers que les français ont su sublimer.
A propos du thé, plutôt propre aux anglais, qui ayant montré par les faits qu'il était supérieur au chocolat et au café et qu’il ne fut certainement pas pour peu de chose dans la naissance du romantisme miltonien et byronien, est beaucoup plus malicieux envers les femmes qu’envers les hommes (p29). En effet, selon Balzac, le thé rend peu grâce à la beauté de la femme tant ses principes actifs la dessèche jusqu'à la moelle. Le thé n'est pas non plus l'ami de la peau, précise Balzac, il assèche l'épiderme comme l'eau calcaire bien que fruité et coloré comme du sirop d'agave.
A propos du tabac, il faut penser à cet état dans lequel se retrouve le conduit de cheminée quand le feu y est allumé et qui mène la fumée non pas de l'extérieure vers l'intérieur mais de l'intérieur vers l'extérieure. Cet état de bien être qui profitent à ceux qui ont froid de l'intérieur, est un art de vivre que les fumeurs de cigares entretiennent pour ne pas redevenir ordinaire. L'encens que produit le cigare est préférable, nous dit Balzac, à toutes les tendresses d'une femme tant le plaisir que procure le dit objet, à cause de sa nature royale, parfume l'âme aussi bien que le corps. Le fumeur de cigare semble vaniteux, présomptueux et même outrecuidant et outre la signification exagérément libidinale de son machin, l'objet en question est comme un sceptre entre les mains d'un roi et qui fait dire à la bouche qui le maintient, bien des mots qu'elle ne saurait dire autrement. Le lecteur aura compris l'émotion que procure le cigare, et bien que les effets particuliers que provoquent l'essence des feuilles parfaitement enroulées à tout le système respiratoire, soient de nature à assécher le plaisir sensitif - le cigare a besoin, pour être apprécié comme il se doit, d'être couronné par des lèvres particulièrement diplomates. L'usage d'un tel dispositif est vouée à une humanité qui parle trop et qui fait peu, et bien que son tabac ôte à la bouche pas mal de salive et assèche formidablement le gosier il se fume accompagné d'un alcool précieux.
Pour conclure ce court traité, ceux qui veulent connaître, expérimenter et goûter un certain nombre de ces substances pour profiter de leurs biens faits immédiats, se lieront bien corps et âme à ces petites panacées que le diable Trismégiste, en bon chimiste, a préalablement concocté à la suite de son fameux goûter dans l'Eden. En ce sens ces substances sont des divinités ensoleillées qui nous mènent assurément et tranquillement à notre jugement dernier. Mais en proportion raisonnable, ces divinités sont pareilles à des roses vermeils qui dans un vase honorent le salon qui les accueille mais qui bien mal à l'aise dans leur étui de porcelaine semblent, en se penchant, vouloir retrouver le jardin de leur enfance.
Un dernier mot tout de même pour Brillat-Savarin que l'on a évoqué plus haut. En effet Jean Anthelme Brillat-Savarin (ici) qui fut avocat et qui inspira Balzac avec son ouvrage, "Physiologie du goût", a médité par écrit la gastronomie, l'esthétisme culinaire et l'art de la table avec une verve pétillante mais qui à son goût ne le servit pas assez pour exprimer réellement ces sensations quasi extatiques que Dieu nous a offert afin d'honorer par dessus tout un pain et un vin parfaitement transmués en chair et en sang. Si la langue française qui est bien capable de donner corps à des idées tout en déployant des enchaînements savants pour faire ressortir d'invisibles mécanismes, elle reste toutefois prisonnière de sa crypte de chair que l'obscurité vient régulièrement habiter pour l'y contraindre au silence. Et c'est pourtant dans ces ténèbres que le Dieu Hostie se blotti et qu'il se dissout par la suite afin de se combiner à l'ensemble des cellules du corps pour les revivifier. Il est donc dans la nature d'un français qui du catholicisme a puisé sa sève, de glorifier le goût comme on élève le pain et le vin à l'autel. Qui ne comprend pas cela est sourd de la prodigieuse littérature française qui dans l'immense arène du monde a su manifester tout aussi bien la grandeur de l'esprit humain que la robustesse intellectuelle d'une nation qui est née du cœur d'une femme, de sa tendresse et de ses larmes et du sang qu'elle a donné sur le bûcher - et qui fera dire près de cinq siècles plus tard à Jean Cocteau qu'elle est le plus grand écrivain français. Qui connait Jules Michelet saura de qui je parle, pour les autres son ouvrage (ici), qui a déjà bénéficié d'une fiche de lecture, témoigne de cette âme qui choisi de Dieu redressa tout un peuple afin qu'il soit rendu au Ciel. L'effet salvateur que produisit la sainte en France s'accompagna d'une délivrance prodigieuse qui rappellera celle du peuple de Moïse. J'achèverai donc cette fiche de lecture en évoquant un certain Baudelaire qui, dans ses fleurs du mal, averti le lecteur du savant chimiste qui depuis ses ténèbres qui puent, chevauche notre volonté pour y nous faire respirer ses fumantes préparations et qui le plus tranquillement du monde nous font descendre d'un petit pas à la fois sans que nous comprenions que nous sommes avalés dans un bestiaire infâme sorti tout droit d'une toile presque aussi infâme de Jérôme Bosch.
Antoine Carlier Montanari
La nature selon le prix Nobel de médecine Luc Montagnier, n'accepte pas n'importe quoi, c'est à dire on peut faire n'importe quoi à la nature mais si vous faîte une construction artificielle elle a peu de chance de survivre, c'est à dire que la nature aime les choses harmonieuses et ce qui est étranger par exemple n'est pas bien toléré. Donc ce qui se passe, au fur et à mesure que l'épidémie se développe, il y a une évolution par des mutations, les séquences vont muter
elle disparait par délaition qui consiste à expulser
materiel génétique
séquence
biologie moléculaire et spirituelle
le peuple hébreu est codé