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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

29 Feb

Un Livre Que J'ai Lu (115) Est-ce Tout Naturellement Qu'on Devient Heureux ? (Aristote)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Un Livre Que J'ai Lu, #Aristote

 Il y a une catégorie, nous dit Aristote, celle du jouisseur, qui pense la vie selon les plaisirs corporels (p17). Cette catégorie, bien retenue aux affaires basses du monde, ne fait que demeurer à l’écart de la source du vrai bonheur, tant sa manière d’être la rapproche de ce bœuf, qui fort vénéré en Egypte, se voyait offrir bien des délices pour assouvir sa libido. L’animal, qui bien heureux en affaire, ne sera véritablement jalousé que par l’homme qui comme lui trouve dans les ébats sexuels la source de son bonheur, mais cet homme-là, pourrait-on dire, ne peut être plus estimable qu’une bête (p19). Qu’en est-il alors de l’homme qui ne trouve pas son bonheur dans la volupté ? Celui-là, appartient à la catégorie des philosophes, pour lui la sagacité est le moyen d’atteindre la félicité. Mais qu’est-ce que la sagacité demandera le jouisseur. La sagacité est la capacité de l’odorat à distinguer des odeurs dont la substance est invisible au regard,  par extension à l’esprit, la sagacité dont parle Aristote permet de percevoir avec l’intellect ce que l’œil ne voit pas. Cette perception mentale est à même d’offrir au philosophe la mesure de la vérité et de toutes les choses qui nous sont cachées. Si Aristote développe l’idée que la sagacité est un phénomène d’extension de l’être à la vérité, il faut comprendre par-là que la vérité est la source du bien et donc du bonheur. Plus l’être empreinte le chemin qui mène à la vérité, plus il tend au bonheur. La prise de conscience de la vérité procure à l’être un sentiment d’émerveillement ou inversement en fonction de sa disposition morale. Si l’être est fermé à la vérité, l’être plongera dans les ténèbres pour échapper aux tourments que provoque l’illumination de la conscience. A l’inverse, l’être illuminé souhaitera être d’avantage illuminé. 
 

 Ainsi le manteau est utile au corps dans le sens où il protège le corps du froid et des intempéries, aussi la vérité est quant à elle utile à l’âme afin que celle-ci ne s’égare pas. Le manteau est en ce sens vertueux car il remplit parfaitement sa tâche (p33). De même, la vérité est vertueuse car elle donne un grand bien à l’âme. Par conséquent la tâche d’une chose est donc d’être la plus vertueuse possible, d’être dans son meilleur état possible (p33, p34).  La vertu ici est à mettre en rapport non pas avec la vertu théologale, mais avec la vertu fonctionnelle, laquelle est attribuée à l'objet ou à la personne et que celui-ci ou celle-ci en accomplissant parfaitement la tâche qui lui a été attribué, devient vertueux ou vertueuse. 
 

 Voici donc deux petits tableaux (ici), dans lesquels une série d’objets (tableau du haut) et une série de personnes (tableau du bas) vont nous servir de témoins vertueux ou non en fonction de l’accomplissement de leurs tâches respectives.


 Dans le tableau du haut nous avons 4 colonnes. La première colonne désigne les objets, la deuxième colonne désigne leur fonction, la troisième colonne désigne la conséquence après une tâche effectuée et la dernière colonne indique en fonction de la tâche accomplie si l’objet en question est vertueux ou non.

  • En premier objet nous avons notre fameux manteau. Sa fonction est de protéger du froid et des intempéries mais voilà que le manteau acheté par ce client n’est pas imperméable, il prend l’eau lorsqu’il pleut. Ce manteau ne remplit donc pas sa tâche correctement, en ce sens on dira de ce manteau qu’il n’est pas vertueux. 
  • En second objet nous avons un bateau. Sa fonction est de naviguer mais lors de la première sortie il coule. On peut donc dire qu’il n’a pas rempli sa tâche, en ce sens ce bateau n’est pas vertueux. 
  • En troisième objet nous avons un stylo. Sa fonction est d’écrire mais lorsque son utilisateur écrit avec, de l’encre s’échappe et coule sur la feuille de papier. Ce stylo ne remplit donc pas correctement sa tâche, il est défectueux, en ce sens il est non-vertueux.
  • En quatrième objet nous avons un couteau de cuisine. Sa fonction est de couper de la nourriture. Lors d’un repas ce même couteau coupe un morceau de viande assez facilement, laquelle fut un peu trop cuite. Ce couteau remplit donc bien tâche, en ce sens il est vertueux

 Le tableau du bas est identique à celui du haut, à l'exception des objets qui ont été remplacés ici par des personnes. 

  • En première personne nous avons donc un boulanger. Sa fonction est de faire du pain et les clients trouvent que son pain est savoureux et que la croûte et la mie forment une heureuse combinaison . Ce boulanger remplit donc sa tâche parfaitement, en ce sens on dira de ce boulanger qu’il est vertueux. 
  • En deuxième personne nous avons un plombier. Sa fonction est de réparer la tuyauterie défectueuse. Mais après une réparation, la fuite n’est toujours pas colmaté, la réparation fut bâclée. On peut donc dire qu’il n’a pas rempli correctement sa tâche, en ce sens ce plombier n’est pas vertueux. 
  • En troisième personne nous avons un médecin. Sa fonction est de soigner les malades mais un mauvais traitement tue le malade. Ce médecin ne remplit donc pas correctement sa tâche, il est dangereux, il est donc non-vertueux.
  • En quatrième personne nous avons un chauffeur de taxi. Sa fonction est de transporter les clients en voiture. Mais voilà que le touriste transporté a payé plus cher parce que le chauffeur du taxi a volontairement choisi un itinéraire plus long.  Ce chauffeur de taxi n’a donc pas bien remplit sa tâche, en ce sens il est non-vertueux

 Par conséquent  le meilleur état d’une chose ou d’une personne c’est sa vertu (p33). Par extension, l’âme est vertueuse si elle accomplit correctement la tâche qui lui incombe. Dès lors le meilleur état de l’âme, selon Aristote, en citant Anaxagore, c’est de contempler le ciel et l’ordre qui règne dans l’univers entier (p20). Et cet ordre céleste qui fonctionne agréablement et parfaitement est un ordre vertueux puisque il remplit sa tâche parfaitement. Il en résulte une harmonisation nécessaire à la propagation de la vie. En cela, un système vertueux encourage la vie tout en étant bénéfique pour elle. Ce bien achevé constitue pour Aristote le bonheur (p35). L’être bien orienté, orienté vers cet ordre céleste met l'âme dans une disposition d'accomplissement puisque le système vertueux qu’il observe l'entraîne à devenir vertueux par mimétisme. C’est à cette fin que l’âme doit tendre, et cette fin est une tâche bien noble qui rend l’âme disponible à la vérité. La tâche définit donc l’état de l’âme et c’est ce en quoi la tâche vaut mieux que l’état dans laquelle se trouve l’âme (p34).


 Sur la question de l’amitié, Aristote définit,  par opposition à la solitude, qui, dit-il est la chose la plus terrible qui soit (p40), 3 formes d’amitié. Il existe l’amitié fondée par la vertu, l’amitié fondée par l’utile et l’amitié fondé par l’agréable (p77).

  • L’amitié fondée par la vertu réunie quant à elle les personnes aimantes, indépendamment de l’utilité, de manière à ce que l’on désire des choses bonnes pour la personne aimé (p47, p49). Et c’est précisément cette volonté produite par la vertu qui doit être, nous dit Aristote, enseignée et encouragée par la politique (p50).
  • L’amitié fondée par l’utile peut être comparé à ces parties du corps qui sont jetés par le corps lui-même. Ainsi le crachat, les ongles et les cheveux  sont tels des amis du corps qui n’ont plus d’utilité pour le corps (p42). Cette sorte d’amitié est égoïste elle est d’ordre pratique car le bien que l’on pourrait souhaiter pour un ami est un bien que l’on souhaite en vérité par pour lui-même mais pour soi-même (p70)
  • L’amitié fondée par l’agréable est basée sur le plaisir. En effet l’expression joindre l’utile à l’agréable renvoie à ces deux formes d’amitié qui fait que l'amitié fondée par l'agréable se superpose à l'amitié fondée par l'utile afin de la relever d'un cran.

 Outre ces trois formes d'amitié, Aristote fait également reposer l'amitié tantôt, sur l'égalité, tantôt, sur la supériorité (p59). En effet la notion de supériorité dans l’amitié n’est pas à négliger, ni celle de l'égalité car l'amitié construit un  lien social qui est définit par le degré d'élévation dans la société. Les ouvriers demeurent entre-eux et les cadres dirigeants entre-eux. Il se peut toutefois, nous dit Aristote, que celui appartenant à une classe supérieure tisse une amitié avec une personne appartenant à une classe inférieure (p60). Dans ce cas précis on reprochera à la personne appartenant à la classe supérieure d'aimer quelqu'un qui ne le mérite pas (p60) et dans le sens inverse on jalousera la personne appartenant à la classe inférieure d'aimer une personne appartenant à une classe supérieure car c'est atteindre, grâce à cette amitié, une sorte de bonheur supérieur par les privilèges éventuellement accordées par la personne appartenant à la classe supérieure. Dès lors que se manifeste une amitié d'infériorité ou une amitié de supériorité, l'environnement social tend à éconduire ce lien car il est contraire à l'ordre naturel qui a établi une hiérarchie des natures, des êtres et des choses qui la compose. C'est pourquoi le socialisme qui nie tout principe naturel est cette forme vulgaire et grossière de l'humilité chrétienne qui tend à abaisser les supérieurs et à élever les inférieurs. Si le christianisme a inversé l'idée que se faisait le monde de la supériorité et de l'infériorité, le socialisme a quant à lui reconstitué une supériorité de classe qui ne dit pas son nom. 

 C'est pourquoi les ambitieux sont toujours ceux qui s'estiment inférieurs car pour eux les supérieurs sont en effet à admirer car ils inclinent les inférieurs à les aimer (p61). Aussi ces ambitieux confirment que l'amitié est un moyen utile d'atteindre la classe supérieure. Cette amitié semble donc poursuivre un dessein égoïste, nous dit Aristote (p61). Cette sorte d'amitié se base donc sur un calcul qui fait de l'amitié un commerce profitable puisqu'elle permet d'obtenir plus facilement des avantages en nature. Au regard de ce que nous a dit le Christ, aimez-vous les uns les autres; comme je vous ai aimés. (Jean 13;34), on peut donc affirmer que l'amitié la plus bénéfique est celle qui préconise l'amour, c'est à dire l'amitié fondée par la vertu. En effet une telle disposition d'être fait entrer l'âme dans la paix tout en détruisant la partie médiocre de l'être qui pour survivre ne désire que la guerre. Cet achèvement est cette fin vertueuse qu'évoque Aristote et qui ne peut être désiré que par une âme en bon état (p35).

Antoine Carlier Montanari

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