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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

26 Jan

Un Livre Que J'ai Lu (74) :Petit Traité De Médecine Légale (Michel Durigon)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Un Livre Que J'ai Lu

 La médecine légale s'appuie sur le droit (p10), et le légiste est un praticien qui établi des diagnostiques pour la justice. Ce rapport d'autorité lie le juridique et le biologique afin d'obtenir des conclusions objectives et définitives sur les  circonstances de la mort de chacun des sujets observés. C'est donc Ambroise Paré (p10), au XVIème siècle qui va enrichir le savoir anatomique et faire progresser la chirurgie. Ce même Ambroise Paré sera nommé en 1562 par Catherine de Médicis, premier chirurgien du roi Charles IX. Et c'est en 1603 qu'est confié, par l'intermédiaire d'un édit, au premier médecin du roi la charge de nommer des rapporteurs médicaux et chirurgicaux dans les juridictions du royaume afin d'établir pour la justice des rapports précis à la suite des diagnostiques opérés sur place. L'ordonnance criminelle de Colbert de 1670 viendra confirmer cet édit (p11). Aussi après la période révolutionnaire, en 1794, les écoles de santé sont recréées, la médecine légale y est professé et on axe son enseignement sur l'art de rédiger des rapports juridiques concernant les différents cas de mortalité.

 Au XIXème siècle la science de la médecine se propage et progresse considérablement, grâce notamment à un certain nombre de spécialistes. On peut alors citer, entre autres, le médecin et chimiste Mathieu Orfila qui développera la toxicologie médico-légale. Son fameux traité de Médecine Légale sera publié et traduit à plusieurs reprises. Doisneau publiera également un traité de médecine légale et un code de l'autopsie. Balthazard, quant à lui, développera l'utilisation de la radiologie, de la toxicologie et les empreintes digitales. Leclerc créera un institut médico-légal moderne à Lille et développera la médecine du travail. Il ne faut pas oublier le fameux légiste italien Cesare Lombroso qui fut l'un des fondateurs de l'Ecole italienne de criminologie et obtint en 1876 la chaire de médecine légale à l'Université de Turin. Ce dernier fut célèbre pour ses thèses sur "les criminels nés", il accrédite l'idée d'une décadence générale de la société, pensant que la criminalité ira en augmentant. Pour lui la délinquance et les comportements violents à travers le profil criminogène n'est pas le fruit de la société mais d'avantage le fruit de l'innée. Il estime, après l'étude de 35 crânes d'assassins guillotinés, qu'environ un tiers de la population criminelle le serait de façon héréditaire.

          
 La médecine légale du cadavre peut également être appelée médecine légale thanatologique (p13). Il faut savoir que la thanatologie se définit comme l'étude et l'analyse de la mort, dans la Grèce antique Thanatos était la personnification de la mort. Cet ennemi implacable de la vie a élu domicile dans le Tartare, le lieu, qui comme les enfers, renferme les criminels et tous ceux qui expient leurs fautes dans d'abominables tortures. Ainsi le médecin légiste est devenu le spécialiste de la mort et qui, pour évaluer correctement les blessures l'ayant entraînée, doit s'entourer d'une équipe de spécialistes pluridisciplinaires. Ces mêmes experts sont reconnus officiellement par la cour de cassation. Les multiples méthodes et connaissances spécifiques permettent de répondre précisément aux questions qui échappent aux compétences de la justice (p14, p87).
 

 Aussi en médecine légale, l'examen initial du cadavre dès sa découverte se nomme la levée de corps (p16). S'ajoute à cela l'examen du lieu où à été retrouvé ce dernier afin de relever des détails susceptibles d'apporter des éléments de réponses supplémentaires et même soulever des questions qui entraîneraient la remise en perspective de la mort supposée. L'examen du cadavre est réalisé suivant un protocole spécifique où tout est noté et photographié, à ce propos le film du réalisateur norvégien André Ovredal, The Jane Doe identity, sorti en 2016, en est une remarquable illustration. En effet, dans une morgue d'une petite localité, le médecin légiste assisté de son fils, vont examiner et autopsier le cadavre d'une jeune femme à l'identité inconnue. L’intérêt du film, outre le côté surnaturel de l'histoire, se concentre sur le mode opératoire du médecin légiste pour analyser et disséquer un cadavre. Ce huit clos fait accéder le spectateur aux frontières de la vie et de la mort tout en intensifiant la terreur métaphysique lié aux indices que le cadavre de Jane Doe renferme. Nous ne trancherons pas ici sur les faits surnaturels qu'on dû rencontrer certains légistes aux cours de leurs nombreuses affaires mais ce qui est certain c'est que le corps humain inerte et froid possède véritablement cette illusion du vivant, si bien d'ailleurs que la culture, à travers l'archétype du zombie, en a fait des morts bien vivants .

 Après que le corps ait été soigneusement déshabillé on procède alors aux prises de températures extérieures et corporelle, puis on relève d'éventuelles lividités cadavérique, c'est à dire qui est de couleur plombée, entre le noir et le bleu. On relève également la rigidité et l'aspect des pupilles. Cette levée de corps permet d'éviter que le crime échappe à la justice, on recense des éléments susceptibles d'apporter les preuves d'un homicide, c'est pourquoi, en France, en fonction des moyens, des localités se retrouvent dans l'incapacité de détecter le crime dit "parfait" (p17).
 

 Toutefois le médecin traitant ou soignant peut, lorsqu'il détecte une mort dite "non naturelle", déclencher le mécanisme judiciaire (p18). Ainsi quand l'avortement fut légalisé en 1975, on ne réprima plus les cas suspects d'auto-avortement ou d'avortements clandestins. L'avortement ne devint plus une mort suspecte, l'avortement devint légitime. Une seule loi changea le rapport à la mort concernant l'enfant à naître. Dans ce cas on constate que la loi définit la mort, la loi est devenu arbitre moral.
 

 En ce qui concerne l'autopsie, il en existe deux (p21). D'une part l'autopsie médicale scientifique et d'autre part l'autopsie médico-légale ou judiciaire. La première est effectuée à la demande du médecin traitant et la seconde est ordonnée par un magistrat, un procureur ou un juge d'instruction. L'autopsie comme la levée de corps suit un protocole rigoureux afin d'examiner, sans atteindre à la dignité du corps, l'ensemble des organes et des tissus (p24). Cet examen se concentre essentiellement sur la tête, le cou, le thorax, l'abdomen et le bassin. On effectue systématiquement des prélèvements de sang, de bile, d'humeur vitrée contenu gastrique et des échantillons des différentes viscères pour la toxicologie. Les viscères étant les organes contenus dans une cavité du corps, le cerveau et le cœur sont par exemples considérés comme des viscères. Aujourd'hui les méthodes d'imagerie et de biologie concurrencent l'autopsie en apportant une traçabilité visuelle d'une grande précision. Le rapport qui suit l'autopsie, qui est couvert par le secret judiciaire, énumère les observations pertinentes tout en énonçant les résultats des différentes analyses toxicologiques et les éventuels dommages non observés lors de la levée de corps (p26). Il faut également savoir que ni le radiologue, ni le toxicologue ne sont autorisés à apporter une conclusion définitive quand a la cause d'un décès. Seul le médecin légiste est à même d'en émettre un, en effet il dispose de tous les dossiers d'examen et de tous les résultats d'analyses (p30).
 

 L'auteur évoque au passage le profil génétique d'un individu non pas à travers la fameuse empreinte digitale mais l'empreinte génétique. Celle-ci s'obtient sur une cellule, à l'exception des globules rouges, où les séquences de l'ADN sont analysées afin de définir le profil génétique d'un individu. La méthode est désormais automatisée et permet de faciliter les concordances entre les affaires (p32). Si la police scientifique use couramment de cette technique, elle a adopté également, entre beaucoup d'autres, la morpho-analyse. Cette technique permet de déterminer en fonction des traces de sang de la gravité de la blessure et du type d'arme utilisée.

 L'auteur s'accorde un chapitre sur la détermination de l'heure de la mort. Il est vrai, nous dit-il a la page 35, que la frontière entre la vie et la mort n'est pas si visible que cela. En effet certaines circonstances montrent qu'un individu en état de mort cérébral, par exemple, peut-être maintenu artificiellement en vie puisque tous ses autres organes sont en état de fonctionnement (p35). Mais si on coupe l'oxygénation le corps se décompose alors suivant trois stades, la phase précoce, la phase intermédiaire et la phase tardive de squelettisation. La première phase, la phase précoce est lié au refroidissement du corps, celle-ci est fonction de la température ambiante. Il faut en moyenne 24 heures pour que la température du corps s'équilibre avec la température ambiante (p36). Pendant ce refroidissement certains symptômes comme la rigidité apparaissent. Des lividités également mais ces deux symptômes ne permettent pas de déterminer l'heure de la mort. La seconde phase, survient alors lors de cette phase intermédiaire, le phénomène d'autolyse, c'est le temps de la putréfaction, la destruction des cellules. Au bout d'une huitaine de jours le sang disparaît des vaisseaux, il faut quatre à six jours pour que le liquide céphalo-rachidien disparaisse à son tour. Au bout de deux semaines la mandibule se désolidarise du crâne et au bout de quelques mois, la graisse et les muscles se liquéfient et les viscères diminuent de taille. Quant à la dernière phase, la phase tardive de squelettisation, c'est la phase où le corps a perdu la totalité de ses tissus, viscères, muscles et cellules.
 

 Une chose est à noter, l'auteur précise, dans cette histoire-là, le rôle des arthropodes dont la nature nécrophage les poussent à accélérer le processus de nettoyage du cadavre en dévorant tout ce qui peut l'être afin de le réduire à un squelette. L'examen de ces arthropodes permet d'estimer l'ancienneté du décès et l'examen toxicologique de ces mêmes insectes permet de déterminer une éventuelle intoxication du sujet avant qu'il ne décède (p43).
 

 A propos des causes de la mort, la mort naturelle concerne 90% des cas et la mort violente 10%. Quand on parle de mort violente on parle essentiellement d'accidents de la vie courante et d'accidents de la route. On recense par ailleurs 10 000 cas par an de suicides et 1000 cas d'homicides. Les morts naturelles sont essentiellement causées par les maladies et on dénombre en moyenne, toutes causes confondues, 500 000 décès par an en France (p44, 45 et 46).
 

 Outre les quelques photographies en noir et blanc de personnes mortes violemment, l'une d'entre elles est, pour ma part, particulièrement suggestive (p61). L'autopsie révèle la présence d'une statuette bloquée dans la lumière laryngée. La personne en question est morte asphyxiée par cette même statuette. Cette dernière n'est ni plus ni moins qu'un crucifix que la photographie a rendu immaculé. La blancheur de l'objet détonne avec le côté sanguinolent des chairs mise à nue. C'est en quelque sorte l'image de la présence vivante du Christ mort pour nous et qui demeure présent en nous physiquement et spirituellement à la suite de l'eucharistie. Evidemment le Christ qui fut violemment mise à mort est ici, à travers le crucifix, d'une pureté étincelante dont l'éclat miraculeux produit par la photographie, rappelle avec justesse la participation céleste à la douleur des hommes. Autrefois, un même crucifix trônait au dessus du lit du défunt, et un autre était fixé couché sur le couvercle de son cercueil. Le Christ est cette figure universelle de la mort que des milliards d'âmes ont désiré suivre pour obtenir la vie éternelle.

Antoine Carlier Montanari

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