Galette Larher : Arnaud Larher

 Elle va, comme toutes les galettes, auréoler le front d'une couronne qui rappellera celles des rois mages venus d'Orient pour adorer le Fils de Dieu. Tandis que l'hiver ne s'est pas encore achevé, le bel amandier est si fier d'orner ses branches de fleurs d'un blanc rosé, qu'il s'en couvre entièrement. Cette coiffure bien que rappelant la délicate floraison printanière du cerisier, évoque l'exquise virginité de la mariée. Viennent alors les feuilles vertes qui en autant de petites gerbes s’attellent à accueillir de fraîches amandes. Le temps de la cueillette emplie déjà de joie les cueilleurs dont la tendresse des mains va remplir en abondance les paniers. De là, aucun ne regrette toute cette sueur, le fruit de leur labeur apporte déjà son chaud parfum. Le maître n'a plus qu'à piocher, à concasser, à moudre puis à mélanger aux œufs doucement combinés au beurre. Le sucre viendra faire son affaire, au départ, avant que l'orange, en écorces très fines aura fini par toucher le coeur de ce mélange. C'est là toute la perspicacité du maître, l'orange est comme le soleil levant de Monet. Si le Christ, au solstice d'hiver, est ce soleil qui triomphe des ténèbres, l'impression du peintre des nymphéas, au dessus du Havre, est ce même parfum d'orange qui embrume véritablement tout le palais. Toutefois, en dedans, l'expression de la frangipane demeure fidèle à son baptême. Soigneusement contenu entre les pâtes feuilletées, elle murmure comme un magma assis dans les profondeurs. Mais au dessus, sur la croûte, des girandoles ardentes comme autant de mèches rigoureusement assemblées autour d'un feu, tournoient ensemble comme les roues du flamboyant chariot d'Apollon. 

Antoine Carlier Montanari