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" Notre foi doit être simple et claire, pieuse et intelligente. Il faut étudier, réfléchir pour se faire des convictions, des idées sûres, se donner la peine d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ses croyances. » Marthe Robin

05 Nov

Un Livre Que J'ai Lu (23) : La Peste A Florence Et Autres Textes (Gustave Flaubert)

Publié par Alighieridante.over-blog.com  - Catégories :  #Un Livre Que J'ai Lu

 Comment la famille de Médicis profite de la peste qui sévit à Florence pour cacher les meurtres de ses deux fils. Cette petite histoire débute avec l’apparition d’une certaine Beatricia, dont le talent principal est de dire la bonne aventure aux grands seigneurs. Un soir, justement, deux d’entre eux, deux frères que presque tout oppose, François et Garcia, fils de Cosme de Médicis, s’en vont à la rencontre de Beatricia. L’avenir donnera raison aux prévisions de la voyante, dont le nom évoque  l’amante mystique du poète florentin, l’auteur de la Divine Comédie.  Il n’est pas dit si Beatricia qui contemplait par sa fenêtre, les étoiles qui brillaient au ciel, renvoie à ce dernier vers de l’Enfer qui voit Dante et Virgile le quitter pour rejoindre le purgatoire , E quindi uscimo a riveder le stelle, et de là nous sortîmes pour revoir les étoiles (1), mais, quelques lignes plus haut, dans le même paragraphe, Garcia, en quittant la maison de la voyante, ose ces mots : « - Adieu femme de l’enfer. ». On pourrait s’en tenir là, mais la tragédie qui emporte Florence n’est pas sans évoquer une certaine image de l’enfer décrite à la page 26: « Le peuple mourait en maudissant Dieu et ses ministres, il blasphémait dans son délire et sur son lit d’angoisse et de douleur, s’il lui restait un mot à dire c’était une malédiction. Et puisqu’il était sûr de sa fin prochaine il se vautrait en riant stupidement dans la débauche et dans toute la boue du vice. » .

 L’allusion à l‘œuvre de Dante refait pourtant surface dans la petite histoire qui suit où un libraire, qui vit et travaille à Barcelone, n’avait de foi que pour les livres. Non pour leur contenu mais pour leur forme, et cette adoration quasi mystique avait fait de lui un être satanique dont l’amour des livres l’avait conduit à traverser une maison en flamme pour aller récupérer un ouvrage rare et précieux. La scène rappellera l’entrée aux enfers de Dante et de Virgile, l’évocation, à la page 49, des damnés de Dante, viendra le confirmer.

 Ceci dit, la peste à Florence comporte une part autobiographique, Flaubert a laissé transpirer une charge émotionnelle au travers du frère cadet Garcia dont l’identification est évidente. En effet, Flaubert fut à l’ombre de son frère aîné, comme ce fût le cas de Garcia avec François. La haine de Garcia nous permet de comprendre celle de Flaubert, accentuée par le fait que François, le frère aîné, soit devenu cardinal de l’église catholique, dont la robe écarlate symbolise en quelque sorte la sainteté spirituelle et matérielle. L’idéalisation du frère est ici si manifeste qu’elle mesure toute la démesure qui fut celle de son véritable frère aîné, Achille. C’est dire, ici, ce qui peut se passer dans la tête de Flaubert quand il réalise ce que représente véritablement Achille dans l’histoire des hommes. Etre prénommé ainsi exalte et fortifie déjà celui qui porte un tel prénom, il agit comme un puissant agent d’intimidation. Dans ces conditions l’amertume et la solitude entraînent Flaubert dans une introspection dont l’écriture sera un véritable antidépresseur. La mort de François sera celle d’Achille et la mort de Garcia, la sienne, c’est ainsi qu’il peut conjurer sa propre rancune. Toutefois, sans trop s’attarder sur l’affaire, il n’est pas à négliger que l’assassinat de Garcia par son père Cosme, peut vouloir exprimer le sentiment que Flaubert à de son propre père, la préférence accordé à son frère ainé traduit, à ses yeux, la haine que porte son propre père envers lui-même, tout naturellement le meurtre de Garcia est la concrétisation de ce ressentiment.

Antoine Carlier Montanari

 

(1) Et de là nous sortîmes pour revoir les étoiles, La Divine Comédie, Enfer, Chant XXXIII

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