Le Dessous Des Toiles : Kill Me Please (Olias Barco)
Combien ce film nous rapproche de ce qu'il y a de plus détestable dans la nature humaine et qui, dans notre société, s’engendre tout naturellement puisque l'opinion a, envers le suicide et l'euthanasie, une position plutôt favorable, en effet toutes les raisons qui venaient sanctifier la vie ont été abolies. On le verra, puisque la question de Dieu ne se pose à aucun moment, chacun des aspirants vient confortablement attendre, dans ce grand manoir, la mort. On s'en doute, la publicité faite autour de l'affaire, a attiré quelques fortunes. C'est donc pendant l'hiver, au cœur d'une campagne boisée et loin de la civilisation que des hommes et des femmes viennent ici, comme en séminaire, y vivre leurs derniers instants. Le réalisateur choisi habilement le noir et le blanc pour habiller son histoire, de plus l’époque hivernale est propice à la situation, l'allégorie environnementale souligne efficacement la fin de vie. Aussi, le sinistre rituel qu'opère le directeur de l'établissement est un commerce assez lucratif, adoubé par l’état, qui désire en quelque sorte faire de cette pratique un sacrement civil. Le directeur a reçu la charge homérique de sanctifier le processus, en y apportant ce soin que procure la médecine quand elle fait tout pour sauver les vies qui lui tombent entre les mains. A la vérité, le directeur qui également docteur nous explique que cette pratique est un droit de l’homme. C’est la tâche qu’il s’est confié, comme fut celle de Napoléon, qui en peinture, derrière son bureau, produit d’une manière habile son propre sentiment de puissance. Et pour accorder un plus haut degré de dignité à son action, une sorte de solution miraculeuse porte le patient à décéder sans douleur ni souffrance. Relativement, ce fameux élixir ouvre grande les portes de l’autre vie avec une facilité déconcertante. Mais un incendie dans les cuisines va bouleverser le cours de l'histoire, du moins pour la jeune femme atteinte d'une déficience chronique. La vision d'un homme en train de brûler vif va lui faire reconsidérer la question. A partir de ce moment-là, la grande faucheuse va changer de mode opératoire, désormais quelques individus mal intentionnés, dont on ne sait absolument rien, vont décider de mettre un terme à toute cette mécanique. Dans la situation présente, tout ce cirque est la forme la plus concrète du nihilisme, tout ce petit monde semble en fait destiné à véritablement mourir. Aussi ne craignent-ils pas un jugement à venir qui pourrait leur être salutaire. La vision de l'incendie n'aura préfiguré l'enfer que pour la jeune femme de tout à l’heure, si bouleversée d'ailleurs qu'elle va finir par admettre que sa maladie n'est pas aussi grave qu’elle le prétend. Et là, aussi absurde que peut être la situation, aucune conscience raisonnable ne peut trouver de la dignité dans cette petite humanité qui veut mourir. En fait, il n'y a pas tant de différence avec l'humanité toute entière, qui au travers de ses multiples lois génocidaires, empruntent la même destinée. Ainsi, tout comme le directeur de l’établissement, les politiciens mènent tranquillement les hommes à l'abattoir.
Antoine Carlier Montanari